Marolles, la cour des chats

“Les Marolles offrent le corps d’un grand blessé mais surtout celui d’un grand vivant”, écrit Véronique Bergen dans son tout nouveau livre consacré au quartier.

Écrivaine et philosophe bruxelloise, Véronique Bergen a déjà une cinquantaine d’ouvrages à son actif : essais, romans, monographies ou recueils de poésie, inspirés par de multiples préoccupations et par un intérêt pour des personnalités révoltées ou écorchées. Dans ses livres, on croise par exemple des personnages aussi variés que Ulrike Meinhof, Janis Joplin, Patti Smith, Mylène Farmer, Kaspar Hauser, Jean Genet ou Gilles Deleuze…

Dans cet éventail de centres d’intérêt, il y a la ville, les dynamiques urbaines, les quartiers populaires, comme celui des Marolles où elle a vécu vingt-six ans (rue de la Samaritaine), qu’elle affectionne plus que tout autre et à qui elle consacre désormais un livre.

Ce n’est pas seulement l’histoire, les pierres et la morphologie de ce tissu urbain qui guident ici son écriture, mais aussi le terreau de luttes et de métissage qu’il représente. Une zone de vie libre et d’anticonformisme, décrit-elle. Un quartier en marge et de la marge. Défiguré et démembré, mais qui a toujours résisté aux volontés disciplinaires et où l’enjeu est de tous temps politique.

Cet essai n’est pas à proprement parler un travail journalistique, ni sociologique. C’est plutôt une ode à la désobéissance. Un hommage à ce quartier qui a permis d’inventer d’autres manières d’exister et de penser. Un récit de vie. Une déambulation dans l’espace et dans le temps, convoquant tour à tour passé et présent, recensant rues et impasses disparues, rencontrant des figures connues et donnant la parole aux oubliés, dépeignant des lieux, témoignant d’un esprit, d’usages et de modes de vie particuliers mis en péril par la gentrification…

On suit l’auteure au fil des pages, fouinant les étals du Vieux Marché et s’intéressant à cette plaque tournante de la récupération d’objets ; puis nous faisant traverser les batailles gagnées ou perdues, depuis la construction du Palais de Justice jusqu’à la récente mobilisation contre la vente de plusieurs immeubles de la rue de la Porte Rouge, en passant par les luttes contre la construction d’un parking sous la place du Jeu de Balle ou pour la réouverture du Vieux Marché pendant les confinements…

Mais vous vous demanderez peut-être : quel rapport avec les chats dans tout ça ? Réponse à la lecture du livre…

Gwenaël Breës

“Marolles, la cour des chats”, Véronique Bergen, CFC Editions, 192 pages, 18 €